Carl Rogers a beaucoup réfléchi sur ce qui pousse les gens à changer et à se développer. Il parle souvent de l’actualisation de soi, un concept vraiment intéressant. Il trouve un appui à ses propres recherches chez Kurt Goldstein, un chercheur qui a travaillé avec des vétérans de guerre ayant subi des lésions cérébrales. Goldstein a remarqué que les gens ont une seule pulsion principale : celle de s’accomplir. Rogers a trouvé cette idée très pertinente et l’a intégrée dans son travail en psychothérapie.
« Chez la plupart des individus, sinon tous, il existe des forces de croissance, des tendances à la réalisation de soi, qui peuvent constituer la seule motivation de la thérapie … L’individu a la capacité et la force de concevoir, sans aide, les étapes qui le conduiront à une relation plus mûre et plus confortable avec son environnement réel. »
Rogers propose l’idée que chaque individu a en lui des forces de croissance et une tendance à se réaliser. Selon lui, ces forces sont souvent la principale motivation en thérapie. Il pense que chaque personne est capable de déterminer, par elle-même, les étapes nécessaires pour mieux s’adapter à son environnement, sans avoir besoin de conseils directs.
Cependant, Rogers souligne qu’un environnement thérapeutique favorable est essentiel. Ce climat permet à l’individu de libérer son potentiel et d’atteindre la maturité.
Il explique aussi que cette idée de l’autodétermination a été critiquée. Certains ont dit que Rogers était trop optimiste, ou qu’il suivait la pensée de Rousseau. Mais Rogers insiste sur le fait que son approche est basée sur une longue expérience clinique. Contrairement à ceux qui voient l’homme comme fondamentalement destructeur, il croit que, lorsqu’on est libre, on évolue naturellement vers une vie épanouie et intégrée.
« Lorsque [l’homme] est pleinement homme, lorsqu’il est son organisme complet, lorsque la conscience de l’expérience, cet attribut typiquement humain, est pleinement opérationnelle, alors on peut lui faire confiance, alors son comportement est constructif. Il n’est pas toujours conventionnel. Il ne sera pas toujours conforme. Il sera individualisé. Mais il sera aussi socialisé. »
Rogers parle aussi de ce qu’il appelle « la personne fonctionnant pleinement ». C’est une personne qui vit pleinement son processus de croissance. Il pense que ces personnes, quand elles sont libres, sont dignes de confiance et leur comportement est constructif. Elles vivent une vie riche et variée, avec une grande conscience de leurs expériences.
Il rejette aussi l’idée que l’homme soit fondamentalement irrationnel et destructeur. Pour lui, le comportement humain est rationnel et orienté vers des objectifs que notre organisme veut atteindre. Le problème, ce sont nos défenses qui nous empêchent de voir cette rationalité. Mais, pour quelqu’un qui vit pleinement, ces barrières diminuent et il devient plus harmonieux avec lui-même.
Vivre « la bonne vie » selon Rogers, c’est vivre une vie riche et variée. Les personnes avancées en thérapie ressentent leurs émotions plus intensément. Elles connaissent la douleur et l’extase, la colère et l’amour, la peur et le courage. Cette intensité est possible grâce à une confiance en elles-mêmes, ce qui leur permet de faire face à la vie.
En résumé, Rogers nous propose une vision très encourageante de la nature humaine. Il voit la thérapie comme un moyen de libérer nos tendances naturelles à la croissance et à l’accomplissement.
Source : Carl Rogers – 1989 – Dialogues – §2